Portrait du professeur Isaac Bazié

Photographie d'Isaac Bazié, membre du LAFI

Intérêts de recherche et parcours académique :

J’ai trois patries : une de naissance, le Burkina Faso. Une intellectuelle, l’Allemagne; et une de choix, le Canada. Dit ainsi, c’est très schématique, mais c’est la formule la plus simple pour me présenter ici. J’ai découvert la littérature avant d’en faire un métier d’enseignement, en lisant et en écrivant. J’ai écrit mon premier roman à 17 ans. Il a été primé dans le cadre du Grand Prix National des Arts et des Lettres 1988, au Burkina Faso.

Je travaille ces dernières années sur l’Afrique-monde. Les questions postcoloniales et décoloniales, la place de l’Afrique dans le monde, la construction de la figure du Noir et les questions identitaires me hantent dans mes réflexions théoriques et dans mes enseignements.

Le choix pour le Québec:

Après ce que j’appelle une germanisation intense (j’ai un doctorat en littérature comparée de l’Université de Bayreuth, rédigé évidemment en allemand), ma meilleure moitié et moi avons voulu retourner dans un milieu francophone en dehors de la France. Le Québec s’est tout de suite présenté comme la première option. Évidemment, il y a des différences majeures entre les établissements québécois et les Allemands. Je me souviens que dès les premiers jours, je me suis retrouvé dans une université montréalaise et j’ai demandé où se trouvait le restaurant universitaire. Le jeune qui m’a répondu a éclaté de rire et m’a dit : ça se voit que vous venez de l’Europe! Mais au-delà de l’anecdote, j’ai eu aussi mon choc en classe, dans le rapport prof-étudiant.e.s très différent de ce que j’ai connu en Allemagne avec mes professeurs, français ou allemands. Je ne me suis toujours pas fait au tutoiement spontané, même après plus de 20 ans…

Engagement académique et ministère pastoral:

Pour moi, la foi et l’aide caritative apportée à la communauté à travers une église ne sont pas incompatibles avec mon engagement académique et intellectuel. J’ai toujours fait les deux. Quand j’étais au doctorat, je faisais en même temps une formation théologique et pastorale. C’est ce côté de moi qui m’a aussi poussé à fonder, avec mon épouse cet orphelinat, Havila, au Burkina Faso où nous avons, en toute modestie, apporté un changement visible dans la vie de plusieurs jeunes et adultes.

La création du LAFI à l’UQAM:

Le LAFI est le fait d’une conjoncture très favorable. En 2015, j’ai contacté mon collègue Issiaka Mandé pour lui parler de mon désir de créer une sorte de centre, équipe ou regroupement des personnes à l’UQAM dont le travail portait sur l’Afrique. J’avais constaté que les expertises uqamiennes sur l’Afrique étaient moins présentes sur la carte, même à l’UQAM. Pourtant, il se fait une recherche et des enseignements extrêmement solides par des collègues qui ne se connaissent même pas. Quand j’en ai parlé à Issiaka Mandé, j’ai compris que je n’étais pas le seul à nourrir ce projet de fédérer les chercheures et chercheurs en études africaines pour plus de visibilité et d’impact. Il m’a parlé de Marie-Nathalie LeBlanc et finalement, en 2016, le LAFI est né. Il est un outil pour renforcer la synergie entre les chercheures et chercheurs dont l’Afrique est l’objet principal. Le LAFI est né à l’UQAM, mais il n’est pas une exclusivité uqamienne : il accueille des chercheures et chercheurs d’autres institutions et se démarque par les fortes collaborations avec les collègues qui travaillent en Afrique.

Autre carrière que l’enseignement

Écrivain. J’aurais lu des livres et j’en aurais écrit.

Conseils aux jeunes chercheur-es et réflexions sur l’enseignement:

Ce serait de cultiver leur esprit critique et d’être audacieux. Nous sommes à un point tournant dans l’histoire. L’Afrique globalement est pris dans un corps à corps tout à fait passionnant avec des questions qui n’ont jamais vraiment été réglées : nous sommes dans une autre phase de décolonisation et de repositionnement. Nous avons besoin de propositions audacieuses et innovantes pour accompagner le continent dans cette démarche.
L’enseignement pour moi est un privilège : je ne prends jamais pour acquis que mon auditoire vienne m’écouter et « partager mes hantises », comme je le dis souvent à mes étudiant.e.s. Enseigner, c’est donc honorer l’attention critique que l’on m’accorde, avec le modeste espoir de pouvoir communiquer des savoirs et une passion pour les objets qui sont les miens.

Opinion impopulaire:

Je ne pense pas qu’il s’agisse d’opinions impopulaire, mais de points de vue qui peuvent changer de cas et de porteurs : le racisme systématique, la foi chrétienne etc.

Passe-temps:
Lire des livres que je n’ai pas inscrits au programme de mes cours. Regarder des documentaires sur l’Asie.